Affaire Sinner : la vaste blague de mauvais goût

Chaque semaine, un résumé à la volée de l'actu tennis

Service à la Cuillère
7 min ⋅ 21/02/2025

Sommaire

  • Affaire Jannik Sinner : on peut maintenant négocier sa suspension !

  • Ce que vous avez manqué : on passe sur le court pour un peu plus de plaisir

  • Pendant ce temps sur les challengers : un français et un espagnol en feu, toujours les mêmes

  • Elles ont raté leur quinzaine : Polina et Veronika sont sœurs, c’est certain

  • Il a osé le dire : Reilly Opelka, grande taille et grande gueule

  • Ils nous quittent trop tôt : une vague de départs, mais pas scélérate

On l’avait oublié ! Notre fantastique “Qui suis-je” d’il y a deux semaines déjà ! En même temps c’est digne du bonhomme, imprévisible, capable de disparaître pendant 28min (le temps d’un match pour lui) et revenir en trombe, faire une ou deux sorties et repartir boire des verres. Bernard est là ce soir ?! Fermez le bar, fermez le bar” dira un jour Rafa Nadal en Inde en se marrant.
Car oui, c’est évidemment de Bernard Tomic dont on parlait. L’australien, même si sa fédération aimerait qu’il soit autre chose qu’australien, n’en a pas fini avec le tennis et on ne sait pas trop pourquoi. Pour nous faire rire tant qu’il ne fait rien de vraiment répréhensible, sans doute…

Bernard Tomic en plein match ©theaustralian.com

Jannik Sinner-AMA : petits arrangements entre amis ?

On attendait une décision du TAS en Avril, comme on nous l’avait communiqué. On y a cru.
Et puis par un beau matin ensoleillé de février (ça dépend d’où vous étiez mais à Valenciennes ça allait), l’Agence Mondiale Antidopage, l’AMA pour faire court, nous a… pris de court.

L’AMA donc, d’un laconique communiqué, informe être parvenue à un accord et une suspension de 3 mois de Jannik Sinner après que l’italien ait été contrôlé positif à deux reprises il y a 11 mois au clostébol. Mais il n’y avait aucune intention de se doper et c’est une négligence de son équipe de l’époque qui conduit l’agence à prendre cette sanction.
Tu parles. C’est surtout que ça négociait sévère depuis plusieurs semaines entre l’AMA et l’armée d’avocats sûrement grassement payée du n°1 mondial pour arriver à quelque chose qui convient aux deux parties. Pas au reste du monde. Mais alors pas du tout.

Le timing et la durée sont étonnants à tout le moins. Trois mois lorsqu’on parlait de un à deux ans, c’est rassurant. Trois mois qui débutent le 9 février et se terminent le 4 mai, juste avant le Master 1000 de Rome (donc à la maison) pour arriver juste bien à Roland, c’est quoi ? Parce que dans l’histoire, Sinner ne va louper aucun Grand Chelem, qui sont ce pour quoi il joue et gagne.
Il y a comme une impression de choix à la carte dans cette affaire qui a fait bondir tout le microcosme du tennis. Parce que c’est du jamais vu, et le sentiment d’un traitement à deux vitesses selon la tête (ou le classement) du client n’a jamais été aussi flagrant. C’est pas nous qui le disons, mais Djokovic, Zverev, Bonzi ou Broady pour ne citer qu’eux.
Que le clostébol, par ses doses infimes retrouvées dans l’organisme de Jannik Sinner, n’ait eu aucun impact sur ses performances, toute personne une peu objective (donc tout le monde sauf Nick Kyrgios en gros) peut le croire. Mais que cette affaire soit traitée comme elle est traitée donne le droit à tout un tas d’interprétations différentes… et souvent justifiées.
Il y a les italiens qui auraient voulu que Sinner soit blanchi. Alors qu’il est reconnu coupable. De négligence, mais coupable.
Il y a le reste du monde qui aurait voulu plus de transparence, de clarté et d’objectivité tout au long de cette affaire.
Et il y a des joueurs et joueuses qui ne croient plus au système. Encore une fois, Simona Halep enrage et on est en droit de penser qu’elle a le droit d’enrager, au point de prendre sa retraite.

Ah, et juste une petite stat’ à propos du clostébol. Depuis 2019 et jusque 2023, 38 italiens ont été pris par la patrouille au clostébol… Soit la moitié des cas recensés environ. S’agirait peut être de se pencher là dessus un jour…

Vous vous demandez qui c’est ? La réponse vient en dessous ©Reuters

Ce que vous avez manqué : direction les courts où ça continue de jouer

ATP 250 Marseille - France : Humbert a les clés du Palais des Sports
Le mois de février est dangereux pour Ugo, qui remet 2 titres en jeu. Ça se déroule bien pour le moment puisqu’il a réussi à conserver ses points acquis dans la cité phocéenne l’année dernière. En finale, il a su ramener à la raison (7/6 6/4) un Hamad Medjedovic qu’on n’avait jamais vu à pareille fête mais qui rappelle à tout le monde qu’il a du feu dans le bras droit, qu’il est serbe, et fêlé juste ce qu’il faut pour monter très, très haut. Vraiment très très haut. (Il a collé 3 et 2 à Medvedev en demies).

ATP 250 Delray Beach - Etats-Unis : Kecmanovic versus LaFokine, ça a tremblé de la feuille
Il ne fallait pas être cardiaque en finale de Delray Beach cette année et même s’il n’y avait pas d’américain en finale, le public en a eu pour son argent. Davidovich Fokina, à la recherche de son premier titre, a cru arriver à ses fins. Mais pour une affaire de millimètres (ligne et bande du filet) contre lui sur ses deux balles de match, c’est Miomir Kecmanovic qui s’en va avec le trophée sous le bras. Dur.

WTA 250 Buenos Aires - Argentine : un brésilien de 18 ans rachète l’Argentine
Joao Fonseca est pressé, mais fait les choses bien. Il est allé conquérir son premier titre à l’ATP à 18 ans chez les voisins argentins et a même réussi à être apprécié en étant brésilien. C’est dire la dimension qu’il prend. D’autant plus quand on regarde son parcours… 4 argentins à son tableau de chasse cette semaine. On ouvre les paris dès maintenant : quand est ce qu’il rentre dans le top 10 lui ?

WTA 1000 Doha - Qatar : si vous aviez la bonne finale et la gagnante, vous êtes désormais riche
Le gratin féminin avait bien sûr fait le déplacement pour le premier Master1000 de la saison. Mais Sabalenka (n°1) et Gauff (n°3), sorties dès leur premier match, n’étaient pas au courant qu’il fallait bien jouer dès le début. Pas plus que Paolini (n°4), Swiatek (n°2) ou Jabeur, détruites par Ostapenko. D’ailleurs Swiatek est menée 5-0 face à la lettone !
Au bout du compte, c’est une fille qui devrait être du niveau des meilleures qui s’est mise au niveau des meilleures à Doha. Amanda Anisimova, passée par bien des galères alors qu’elle n’a que 23 ans, est la seule à stopper Ostapenko et remporte son plus beau et gros titre. L’américaine est 18ème mondiale aujourd’hui et ce n’est peut être pas fini.

Attention, Hamad aussi met le nez à la fenêtre ©LaProvence

Pendant ce temps sur les challengers…

Challenger 125 de Manama - Bahrein : la méthode Vavassori, vous connaissez ?
L’italien a tapé sur les doigts de Marton Fucsovics et a fait la leçon à tout le monde au Bahrein. Voilà voilà.

Challenger 75 de New Delhi - Inde : Kyrian Jacquet, de la caste des invincibles
Kyrian Jacquet pensait être au max avec sa victoire à Chennai. Il a compris qu’il pouvait l’être encore plus en s’imposant de nouveau, toujours en Inde, en faisant la morale à Ptit Billy Harris. Superbe !

Challenger 75 de Tenerife 2 - Espagne : vous fatiguez pas, c’est pareil que la semaine dernière
Pablo Carreno Busta a gagné Tenerife 1. Il n’est partageur et a préféré se faire mousser en gagnant aussi Tenerife 2. Voilà voilà.

Elles ont raté leur quinzaine

Rentrer à bicyclette une fois, ça peut arriver. Demandez aux adversaires de Swiatek toute l’année. Contre une Belinda Bencic dopée boostée aux hormones maternelles, aussi. Quand on s’appelle Veronika Kudermetova, qu’on a 27 ans donc censé être en plein prime et ancienne 9ème mondiale, ça l’est tout de suite un peu moins. C’est pourtant ce qu’il s’est passé à Abu Dhabi il y a deux semaines pour Vero. Soit. Une petite erreur de parcours qu’on se dit.
Le problème ? C’est l’exemple donné. Parce que sa petite sœur l’a copié… la semaine d’après à Doha. Prendre un 6/0 6/0, passe encore. Mais quand ta petite sœur t’imite la semaine suivante, ça devient problématique. Polina Kudermetova donc, n’a pas marqué un jeu face à Daria Kasatkina. Qui n’est pourtant pas réputée pour son service ni sa puissance de feu.
C’est ce qui s’appelle une quinzaine ratée dans les grandes largeurs pour la famille russe.

Forcément si elles jouent avec une raquette pour deux… ©WikimediaCommons

La décla de la semaine : les doubles, ça sert à rien pour Reilly

Reilly Opelka ne s’est pas fait que des copains cette semaine dans le monde du double au tennis. Mais qui pour rentrer dans le buffet d’un mec qui fait 2m11 ? Hein, qui ?

Le double aujourd’hui, c’est pour les joueurs de simple qui ont échoué. Il n’y a pas de spécialiste du double.
Ils ne vendent pas de billets, occupent des terrains d’entraînements et des physios, ne font pas de bénéfices et réclament plus d’argent…
Si vous voulez mon avis, c’est un comportement assez cupide

Et encore, ce n’est qu’une partie de sa sortie où il a balancé autant de punchlines que d’aces. Et il en balance beaucoup, des aces.

La solution pour le géant américain ?
Garder 8 équipes de double à chaque tournoi en ouvrant ces tournois seulement aux meilleurs joueurs de simple inscrits. Ou alors encore mieux, carrément s’en débarrasser.
Il n’a rien contre les joueurs de double mais s’appuie sur une logique de maths. Il propose cela pour donner plus d’argent aux challengers qui pourront ensuite redistribuer tout ça aux joueurs de simple qui en ont besoin pour se payer… des coachs, des physios et espérer faire une carrière en simple.
Il y a du bon et du moins bon dans tout ça. Du vrai et du moins vrai. Mais si Opelka se trompait de cible en disant cela ? Parce que la redistribution des revenus générés par les tournois aux joueurs est de l’ordre de 17% au tennis, contre 40 à 60% pour d’autres grands sports. Et ce n’est pas à cause des joueurs de double. A méditer…

Petit Diego ? Non, regardez son ombre ©Zuma/Psnewz

Ils viennent de nous quitter

On a eu droit à trois départs à la retraite marquants en très peu de temps. Faut quand même qu’on en parle, surtout que ce n’est pas n’importe qui.

Simona Halep : la roumaine, 33 ans, s’est vue fauchée en plein prime ou presque. Pas par un fou du volant, non. Mais par une décision de l’ITIA (celle là même qui a blanchi Jannik Sinner) qui n’a rien cherché à savoir et lui a collé 4 ans de suspension pour dopage en 2022 à la sortie de sa victoire au M1000 de Toronto et encore 7ème mondiale. Le TAS (Tribunal Administratif du Sport) a accepté plus tard la thèse de la contamination et réduit sa peine à 11 mois. 11 mois de trop pour Simona qui n’arrivera jamais à revenir. On parle là d’une ancienne n°1 mondiale vainqueure de Roland 2018 et Wimbledon 2019.

Diego Schwartzman : Ya no pour El Peque. L’argentin de poche (1m70 et peut être même moins) avait annoncé en Mai 2024 que Buenos Aires serait son dernier tournoi. Chez lui, pour boucler la boucle. Il a donné au circuit tout ce qu’il avait jusqu’à ce que quelque chose casse définitivement, à Hambourg en 2022. C’était David contre Goliath tous les jours avec lui. Et il a terrassé plus d’un géant grâce à son travail, sa hargne, son déplacement et son talent. Surtout son talent. Diego c’est une 8ème place mondiale, une demie à Roland, une victoire sur Rafael Nadal sur terre à la loyale, une participation au Masters, 4 titres dont le 500 de Rio. C’est une immense carrière pour le plus grand des petits.

Fernando Verdasco : eh oui, ‘Nando, 41 ans, n’avait pas encore officialisé sa retraite même si bon, il ne comptait plus trop dans le paysage ces dernières années. N’est pas Stan Wawrinka qui veut. Ça n’empêche, Verdasco était un sacré joueur et il a tiré sa révérence cette semaine à l’occasion d’un double avec Djokovic. Verdasco c’est l’un des plus gros lift de l’histoire, un coup droit brutal unique et un monument perdu un jour de demi-finale à Melbourne. Un monument de tennis long de 5h14, d’une force et intensité uniques, avec des balles martyrisées qui n’ont sans doute jamais autant tourné sur elles-mêmes. Parce qu’en face c’était Rafael Nadal bien sûr. Bien sûr Fernando a perdu. Mais c’était très beau. Ce sont 7 titres dont un 500 (pour 16 finales perdues, aïe), 3 Coupe Davis et une 7ème place mondiale en 2009.

Trouvez le temps de regarder le chef d’œuvre 2009 ©P.Lahalle/L’Equipe

Service à la Cuillère

Service à la Cuillère

Par Alex Neveu

Service à la Cuillère, c’est l’aventure d’un passionné de tennis pas (du tout) assez talentueux pour faire carrière mais qui a toujours caressé l’espoir de remplacer un jour ce bon vieux Chamoulaud sur France TV pendant deux semaines fin Mai - début Juin si vous voyez ce que je veux dire.

Sans prétention mais pas sans espoir, je souhaite simplement transmettre la passion qui m’anime, raconter des histoires, rigoler et être un peu acerbe aussi, parce que c’est drôle d’être acerbe.
Dépoussiérer le tennis, c’est pas une mauvaise idée non ? Et puis, “mieux vaut les voir faire ça qu’ils traînent dans la rue à faire des conneries” que se disent nos vieux. Je déconne, j’ai plus de 30 balais et je suis bien occupé la journée.

Allez, les joueurs sont prêts, jouez !

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